La Ferrari 12 Cilindri – la Dodici Cilindri – n’est pas une simple remplaçante de la 812 Superfast ; c’est un manifeste roulant. À l’heure où l’hybridation devient la norme, même à Maranello (coucou SF90 et Purosangue), sortir une GT à moteur avant doté d’un V12 atmosphérique pur, sans la moindre fois d’électrification, est un acte de rébellion. C’est un pari technologique et émotionnel audacieux, où Ferrari prétend que son moteur thermique n’est pas en sursis, mais qu’il est, au contraire, la nouvelle référence pour les sept neuf années.
Le Chant du Moteur de l’Apocalypse : 830 Ch et 9500 Tr/min
Oubliez tout ce que vous penserez savoir sur la performance en 2024. Aujourd’hui, on parle de boost électrique, de couple instantané et de moteurs silencieux. Mais quand Ferrari présente la 12 Cilindri, la conversation change radicalement. Le cœur de cette bête est le V12 atmosphérique de 6,5 litres qui crèche 830 ch à 9250 tr/min, avec une zone rouge qui flirte dangereusement avec la perfection à 9500 tr/min. C’est une symphonie mécanique qui n’a pas besoin de haut-parleurs additionnels pour exister.
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La véritable magie n’est pas dans le chiffre de puissance, mais dans la manière dont cette puissance est atteinte. Pour permettre au moteur de grimper à de tels régimes sans s’autodétruire, les ingénieurs de Maranello ont puisé directement dans les technologies de la Formule 1. Le vilebrequin a été allégé, et les bielles sont désormais en titane. Cet allègement structurel, qui permet de réduire de 40% le poids des bielles par rapport à l’acier, est crucial pour l’endurance et la vélocité. C’est l’essence même de l’ingénierie Ferrari : un moteur conçu pour le circuit, mais adapté à la route, promettant une longévité technique qui défie l’extinction annoncée du thermique.
L’Art de la Rupture : Un Design Rétro-Futuriste Signé Manzoni
En matière de design, la 12 Cilindri ne fait pas de compromis et ne cherche pas à plaire à tout le monde. Sous la direction de Flavio Manzoni, Ferrari a pris un virage stylistique net, s’éloignant du langage « sculptural » de la 812 Superfast pour un vocabulaire « radicalement nouveau ».
L’élément le plus frappant est sans conteste le « masque » noir qui intègre les phares à l’avant. C’est un hommage direct à la légendaire 365 GTB/4 Daytona de 1968, reprenant l’idée des optiques cachées sous un bandeau. Mais là où la Daytona utilisait la ligne noire pour cacher ses feux escamotables, la 12 Cilindri l’utilise pour affirmer une esthétique épurée et presque numérique. L’arrière, polarisant pour certains, est un exercice d’aérodynamisme pur, intégrant des éléments actifs avec une discrétion absolue.
Ce choix radical prouve que la beauté n’est plus seulement une question de forme, mais de fonction. Le design de la 12 Cilindri est un manifeste : il n’est pas là pour flatter l’œil de manière nostalgique, mais pour encapsuler la pureté mécanique du V12.
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L’Agilité Secrète : Plus GT que Sportive, Mais Plus Agile qu’une Berlinette
La 12 Cilindri est une GT (Grand Tourer), une voiture conçue pour traverser les continents à des vitesses indécentes. Mais contrairement aux GT classiques qui peuvent manquer d’agilité, Ferrari a triché avec le physique.
Les ingénieurs ont réussi à réduire l’empattement de 2 centimètres par rapport à la 812 Superfast. De plus, elle intègre un système de quatre roues directrices indépendantes (4WS). Ce n’est pas juste un gadget : à basse vitesse, les roues arrière tournent légèrement à l’opposé des roues avant, simulant un empattement beaucoup plus court et améliorant la maniabilité en ville ou dans les virages serrés. À haute vitesse (jusqu’à 300 km/h), elles tournent dans le même sens, garantissant une stabilité chirurgicale, essentielle pour gérer 830 ch en propulsion. Cette répartition des masses presque parfaite (48,4% à l’avant, 51,6% à l’arrière) renforce cette impression d’agilité.
De plus, l’aérodynamique est constamment active. Entre 60 km/h et 300 km/h, deux panneaux de carrosserie peints en noir à l’arrière se relèvent jusqu’à 10 degrés, générant jusqu’à 50 kg d’appui pour coller la voiture au bitume. C’est de l’ingénierie invisible qui transforme le comportement de cette GT, lui permettant de « pivoter autour de vous » comme une voiture au moteur central.
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La Réponse à l’Ère Électrique : Un Acte de Foi
Le nom même de la voiture, 12 Cilindri , est un pied de nez au Zeitgeist de l’électrification. Dans un marché où les régulations deviennent draconiennes, où les coûts d’une telle mécanique sont astronomiques (le coupé débute à 395 000 € en Italie, le Spider à 435 000 €), Ferrari aurait pu céder à l’hybridation légère. Mais Maranello a refusé.
En gardant le V12 atmosphérique pur et en le perfectionnant à ce niveau (bielles en titane, régimes de Formule 1, boîte DCT ultra-rapide), Ferrari ne fait pas que vendre une voiture ; elle vend une expérience brute, auditive et viscérale qui sera bientôt irremplaçable. Elle garantit aux collectionneurs une relique moderne, un placement de valeur, et aux puristes, l’assurance que la passion n’est pas morte.
La 12 Cilindri est une déclaration selon laquelle le V12 n’est pas dépassé, mais perfectionné au point de justifier, par sa seule existence et sa magnificence technique, une exception à la règle électrique. C’est l’ultime Grand Tourer, le dernier joyau de la couronne thermique. Et cela, mes amis, n’a pas de prix.