« Ne l’achetez pas ! » : 3 raisons pour lesquelles les puristes Porsche détestent le Cayenne Turbo GT (et pourquoi ils ont tort).

Le Porsche Cayenne Turbo GT est un paradoxe roulant. C’est une machine de 2,3 tonnes qui se conduit, selon ceux qui l’ont essayée, avec l’agilité d’une 911. C’est un SUV conçu pour déposer les enfants à l’école, qui peut ensuite aller pulvériser une Ferrari V12 sur 400 mètres départ arrêté. Et c’est précisément pour cela que les puristes, les vrais, ceux qui ont de l’huile 10W-60 à la place du sang, le détestent plus que tout. Pour eux, ce n’est pas une Porsche. C’est une hérésie. Un monstre de Frankenstein marketing qui crache sur l’héritage de Ferdinand Porsche.

Mais avant de brûler votre carte de membre du club Porsche, laissez-moi vous dire pourquoi ce débat est le plus stérile de l’industrie. Les puristes s’accrochent à un passé qui n’existe plus, et ils ratent ce qui se passe sous leurs yeux.

« Un SUV ne sera jamais une voiture de sport » (Le péché d’origine)

Pour un puriste, une Porsche, c’est trois choses : légèreté, agilité et un centre de gravité au ras du sol. C’est une 911, un Cayman, une 550 Spyder. C’est une voiture de sport pure. Le Cayenne, depuis son lancement controversé en 2002, est l’antithèse absolue de cette philosophie. C’est un « camion », un « bateau », un véhicule utilitaire glorifié. Les forums sont pleins de cette indignation : « Porsche devrait avoir honte de faire des SUV ». Le Turbo GT, avec son poids pachydermique et sa hauteur de conduite, est donc le bouc émissaire parfait. Il représente tout ce qu’une Porsche ne devrait pas être. Pour eux, mettre le badge « GT » – un badge sacré, réservé aux machines de piste – sur ce monstre, c’est comme mettre du ketchup sur un homard thermidor.

Sauf qu’ils ont tout faux. Ils confondent « silhouette » et « sensation ». Les ingénieurs de Weissach n’ont pas essayé de rendre un SUV « sportif ». Ils ont construit une voiture de sport qui se trouve avoir la carrosserie d’un SUV. La nuance est colossale. Le Turbo GT est truffé d’une technologie si avancée qu’elle tord la physique jusqu’à ce qu’elle supplie pitié. On parle d’une suspension pneumatique 15% plus rigide que celle du Turbo standard, abaissée de 17 mm. On parle de roues arrière directrices, d’un antiroulis actif (PDCC) qui maintient la caisse parfaitement à plat dans des virages qui feraient s’envoler d’autres voitures, et de freins carbone-céramique (PCCB) de série, des monstres conçus pour arrêter un train. Le résultat ? Un propriétaire de 911 Turbo S admet que le Cayenne GT le suit sans problème. Un autre le compare à une M5 Comp, mais avec une meilleure tenue de route. Ce n’est plus un SUV. C’est une arme de siège qui prend les virages à plat.

« Il cannibalise la marque et dilue l’image » (La peur de la vulgarisation)

Le deuxième argument du puriste est plus insidieux. « Porsche est devenu un constructeur de SUV qui fait des 911 en hobby ». Et sur le papier, ils n’ont pas tort. Les Cayenne et Macan représentent la majorité écrasante des ventes de Porsche. Le puriste voit cette popularité comme une dilution. Une vulgarisation. La marque, autrefois réservée aux connaisseurs, est maintenant conduite par des gens qui ne savent probablement même pas ce qu’est un moteur « flat-six ». Le Cayenne est devenu banal. Le Turbo GT est juste le plus cher de ces « faux » Porsche, une machine à cash cynique pour une nouvelle clientèle qui veut juste le plus gros badge.

C’est une vision incroyablement myope. C’est oublier une règle simple en économie : pas de marge, pas de miracles. Savez-vous qui paie pour le développement de la prochaine 911 GT3 RS ? Pour le programme d’endurance au Mans ? Pour les folies d’ingénierie comme le Cayman GT4 RS ? C’est le Cayenne. Chaque Cayenne Turbo GT vendu finance directement les voitures de niche que ces mêmes puristes idolâtrent. Sans le succès financier insolent du Cayenne, Porsche serait peut-être aujourd’hui une petite note de bas de page dans l’histoire, rachetée et oubliée. Le Turbo GT n’est pas une dilution de la marque ; il est son mécène. C’est la célébration ultime de ce succès : il prend l’argent généré par le volume et le réinjecte pour créer l’expression la plus pure de la performance, mais dans le format qui se vend le mieux. Ce n’est pas une trahison, c’est une assurance-vie.

« C’est une machine absurde et inutile » (Le déni de performance)

Il y a l’argument de « l’absurdité ». « À quoi bon ? » demandent-ils. À quoi sert un SUV de 668 chevaux (ou 739 ch pour le nouveau Turbo E-Hybrid) ? C’est trop lourd et trop haut pour un circuit, c’est criminellement trop rapide pour la route, et c’est trop rigide pour être vraiment confortable. C’est un véhicule qui n’a aucun sens. Un Urus a plus de « drama », un Ferrari Purosangue a un V12 atmosphérique, et un Audi RSQ8 Performance fait 95% du travail pour bien moins cher. Le Turbo GT est un roi sans royaume, une réponse brillante à une question que personne n’a posée.

Cet argument est le plus faible de tous, car il ignore l’essence même de la voiture passion : elle n’a pas besoin d’être « utile ». Elle doit être « exceptionnelle ». Et le Cayenne Turbo GT est exceptionnel. Il n’est pas seulement rapide, il est dominant.

Les puristes ont raison sur un seul point : le Cayenne Turbo GT n’est pas une 911. Dieu merci. C’est quelque chose d’entièrement nouveau. C’est le prédateur alpha d’une jungle qu’il a lui-même créée. Alors, ils peuvent bien crier « Ne l’achetez pas ! ». Pendant ce temps, le Cayenne Turbo GT ne se contente pas de déplacer les limites de la physique ; il finance l’avenir même de la voiture de sport qu’ils prétendent protéger. Le détester, ce n’est pas être un puriste. C’est juste ne pas avoir compris le jeu.